Se débarrasser de ses bureaux en 3 étapes : l'histoire de Four Kitchens

Écrit par Sarah Spitz, le 29 août 2018

Quelques années après avoir créé Four Kitchens, Todd se heurte à un problème de taille : il n’arrive pas à recruter. Les bons candidats ayant les compétences techniques nécessaires ne sont tout simplement pas à Austin, et les affaires commencent à stagner sérieusement. Que faire ?

Dix ans après avoir créé Four Kitchens, Todd se lance dans un des plus gros chantiers qu’un CEO puisse vivre dans sa carrière : il décide d’ouvrir ses portes au monde entier en se débarrassant de ses bureaux. En effet, à Austin au Texas, il a du mal à trouver des profils de développeurs Drupal, la plupart travaillant sur WordPress ou Joomla*. Il se dit qu’en devenant une entreprise sans bureaux (aussi dite distribuée), Four Kitchens pourra recruter des talents du monde entier. Mais pour ça, il faut d'abord transformer en profondeur le fonctionnement de l’entreprise…

Going remote is probably the biggest factor in our growth, because we could hire more - Todd Nienkerk, CEO et co-fondateur de Four Kitchens

Todd se lance en 2012 : il engage une nouvelle recrue en Australie et prolonge leur collaboration avec un employé qui vient de déménager sur la côte ouest. Ce premier essai est un double échec : pour le premier parce que le décalage horaire est trop important, et pour le second parce qu'il découvre, un peu tard, qu’il ne supporte pas le travail à distance. C’est bête mais ça arrive. Retour à la case départ pour Todd : il se remet à tourner en rond et les options se réduisent dangereusement.

Mais loin de baisser les bras (ça serait mal le connaitre !), Todd écume les conférences et workshops sur les entreprises sans bureaux. Il note tout ce qu’il entend et se nourrit de tous les conseils qu’on veut bien lui donner. Il tente une deuxième fois l’aventure… mais cette fois, il ne fait pas les choses à moitié. Il applique quasi tous les conseils qu’on lui a donnés, et sa vision est désormais très claire. Four Kitchens doit devenir une entreprise sans aucun bureau, entièrement distribuée.

Pari réussi ! Mais quels sont ces précieux conseils qui ont fait que cette fois, ça a marché ?

Premièrement, celui de ne pas hésiter. Une telle transformation doit se faire de manière radicale. Pendant un an, Todd oblige ses équipes à faire semblant d’être une entreprise sans bureau. Ils organisent systématiquement des chats vidéo au lieu des réunions traditionnelles, même si tout le monde est dans l’immeuble. Et même si ça fait bizarre. Pas d’exceptions, pas de compromis, mais un objectif très clair : à la fin de l’année, plus de bureaux. C’est un engagement très fort : il a dû demander, à l’issue de cette année de transition, aux deux employés ayant refusé de faire cette transition de partir…

Ensuite, il systématise la communication, qu’elle soit formelle ou informelle. Par exemple, une fois par semaine, l’ensemble des collaborateurs (ils sont 40 aujourd’hui) se connecte à un chat vidéo et bavarde, de la pluie et du beau temps, de Batman, de leur week-end…et ce n'est qu'une de leurs nombreuses routines de teambuilding ! Les réunions professionnelles quant à elles sont enregistrées, les comptes rendus sont accessibles à tous. Le fonctionnement de l’entreprise dans son ensemble est synthétisé, documenté, et mis en ligne. Il réduit ainsi au maximum l’implicite, l’informel et l’opaque, qui peuvent se révéler délétère lorsqu’on est à distance les uns des autres.

Apprenant des erreurs du passé, il revoit également ses critères de recrutement : il est désormais beaucoup plus attentif à la capacité du candidat à travailler à distance. Une grande attention est également donnée à l'intégration des jeunes recrues et à leur accompagnement pour les aider à s'intégrer dans ce contexte de travail inhabituel.

Deux ans plus tard, l’entreprise est florissante : ils sont passés de 25 à 36 employés et cette transition a été une véritable bouffée d’air frais pour l’entreprise.

En revanche, financièrement, contrairement aux idées reçues, se débarrasser de ses bureaux ne réduit pas forcément les dépenses de beaucoup. Certes, on ne paye plus de loyer, mais de nouveaux postes de dépense s’ouvrent. Par exemple il est habituel d’organiser une semaine de retraite annuelle pour que les collaborateurs puissent se connaitre, ce qui à 40 représente un sacré budget !

Et… non, ce modèle ne fonctionne pas uniquement pour les petites entreprises de 40 personnes ! Le cas d’InVision, où travaille l'épouse de Todd, en est un exemple assez impressionnant : ils sont… 400.

 

*pour toutes précisions sur ces termes IT, merci de ne pas vous référer à l’auteur qui n’y comprend pas grand-chose.