Un calculateur de salaire ouvert à tous chez Buffer

Écrit par Margaux Borel, le 24 mars 2019

La rémunération a toujours été un sujet épineux. En parler, ne pas en parler, suivre des grilles précises ou valoriser au cas par cas, comment prendre en compte de manière équitable la localisation des collaborateurs... Pour Buffer, dont l’équipe est distribuée aux quatre coins du monde et surtout, dont l’une des valeurs clés est la transparence, c’est un sujet très important sur lequel ils ont choisi de passer du temps ! Aujourd’hui, leur formule de calcul de rémunération est publique et chacun peut la consulter.

La transparence, c’est une valeur fondamentale chez Buffer, plateforme de gestion des comptes sur les réseaux sociaux et entreprise sans bureaux. C’est même la deuxième valeur affichée dans la « Buffer Culture » (qui a vocation à évoluer dans le temps) : « Default to transparency », soit la transparence par défaut. Elle encourage chacun à ne pas perdre une occasion de partager ses croyances, ses décisions, mais aussi ses échecs.

Dès 2013, Buffer décide de publier ses revenus, son nombre d’utilisateurs et ses progress reports qui détaillent le fonctionnement et la performance de son service client. Les salaires de chacun sont également publiés, suite à de longues discussions, avec l’accord de l’ensemble des collaborateurs.

Transparency breeds trust, and trust is the foundation of great teamwork. - Joel Gascoigne, fondateur et CEO de Buffer

L'entreprise a choisi d’aller encore plus loin en mettant au point une formule, rendue elle aussi publique, qui détermine les revenus de chacun. Cela permet d'une part de rester pleinement cohérent avec cette culture qui repose tant sur la transparence et l’équité. C'est aussi une façon de mieux gérer les négociations salariales pour les candidats et collaborateurs.

Il faut bien avouer que le calcul, qui est fait par les équipes RH et finance, n’est pas simple... Les collaborateurs sont dispersés aux 4 coins du monde, et si l’entreprise souhaite être transparente, elle souhaite aussi être juste ! Chaque collaborateur ne fait pas face au même « coût de la vie » et ceci doit aussi être pris en compte dans le calcul de sa rémunération.

 

Une première formule...

En décembre 2013, une première formule voit le jour :

salaire = métier x grade x expérience x localisation géographique (+ 10% si une augmentation salariale est préférée à l’obtention d’actions de l’entreprise)

Un ingénieur part d’une base de $ 60 000 par exemple. Le grade détermine un pourcentage qui s’ajoute (10% pour un VP). L’expérience affecte un coefficient au tout : un junior aura un coefficient de 1, alors qu’il sera de 1.3 pour un “master”. Pour la localisation, vivre à San Francisco ou à Londres coûte plus cher que Manille ou Delhi : cela ajoute un supplément de $ 22 000. Pour plus de détails, vous pouvez les consulter ici.

Puis, une deuxième...

Tout comme la « Buffer Culture », cette formule est « vivante ». Elle a pour vocation d’évoluer avec le temps pour toujours rester pertinente et équitable. C’est ainsi qu’en 2015 une deuxième formule est appliquée, visant à mieux refléter les différences de coûts de la vie :

salaire = [(poste x expérience) + choix entre salaire ou actions] x loyauté

Buffer souhaitait intégrer les prix du marché du travail (et pas seulement le coût de la vie) tout en limitant l’intensité des écarts (l’écart atteignait $ 90 000 entre San Francisco et Le Cap, par exemple). Ils ont donc ajouté la notion de poste, qui dépend à 35% de la moyenne du marché américain affichée et à 65% des coûts de la vie répertoriés (ces informations sont extraites de sites et organismes spécialisés). Deuxième nouveauté, la loyauté (ou ancienneté) : pour chaque année passée à Buffer, le collaborateur reçoit une augmentation de 5% qui s’applique à l’ensemble de la formule.

Mais là encore, tout n'est pas parfait : la localisation géographique affecte la perception de la valeur que chacun apporte à l’entreprise, et des ajustements au cas par cas complexifient le calcul.

Et une troisième

En 2017, une troisième formule est proposée. Buffer, pour simplifier, a préféré prendre une base commune de prix. Ils ont choisi ceux de San Francisco... un des marchés du travail les plus chers ! De nombreux doutes ont alors été exprimés. Certains estimaient que cela coûterait trop cher, d’autres complétaient qu’il était inutile d’être plus généreux que ce à quoi s’attendent les collaborateurs. Cette nouvelle formule a au moins l’avantage de s'adapter aux digital nomads, qui travaillent pour Buffer tout en voyageant à droite à gauche.

buffer

Cette fois, le coût de la vie est pris par rapport au prix du marché médian de San Francisco. Celui-ci est pondéré par un facteur de coût de la vie (100% pour “élevé”, 85% pour “moyen”, 75% pour “faible”). Le rôle correspond au métier, utilisé dans la première version de la formule. Plus de détails ici

Vous voulez calculer ce que cela donnerait pour vous si vous travailliez chez Buffer en 2015 ? C’est possible ici !

Les retours sont plutôt positifs : pour Arielle, utiliser une formule permet d’expliciter un système de rémunération qui peut facilement devenir tabou dans un contexte moins transparent. De plus, elle adresse des sujets délicats comme celui des inégalités hommes-femmes. Hailley quant à elle a remarqué qu’avec l’usage de cette formule et la transparence associée, un champ nouveau de conversation sur les aspects financiers de l’entreprise s’est ouvert.